Marie-Madeleine Duquef est née en 1922 à Amiens, rue Fernel, dans le quartier Saint-Leu. En 94 ans, son plus long séjour hors de son quartier natal n’a duré qu’un mois, c’était pendant l’exode de 1940. Depuis, elle n’a pour ainsi dire plus quitté la rue Bélu où elle vécut jusqu’en 2014.
Sa passion pour le picard vient des souvenirs de sa mère, petite bonne chez sa tante riche qui recevait à sa table Jules Verne, l’évêque d’Amiens et l’écrivain Édouard David ; c’est surtout de ce dernier dont sa mère parlait. Pour ses sept ans, la grand- tante lui fit cadeau du livre d’Édouard David « Marie-Chrètienne » écrit en picard et qui lui rappelait sa mère, ses voisines et les maisons de son cher quartier Saint-Leu.
18 ans en 1940, ce fut pour elle la guerre, la défense passive, la Croix Rouge et les hôpitaux. À la libération, elle exerce son métier de maîtresse d’éducation physique auprès des jeunes filles dans presque tous les établissements privés de la ville, et ce jusqu’à sa retraite en 1982.
Grâce aux Emmaüs installés au sud d’Amiens dans les années cinquante, elle constitue une importante collection régionale de livres et de cartes postales. Dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, elle organise à partir de ce fonds des exposi- tions thématiques sur les quartiers Saint-Leu et Saint-Germain qui furent accueillies au musée postal et à l’église Saint-Leu d’Amiens.
Au début des années quatre-vingt, l’Office Culturel d’Amiens et Laurent Devisme se mirent en quête de textes picards. Marie-Madeleine Duquef répond à l’appel ain- si que quelques autres qui formèrent avec elle, le noyau dur de « Chés Diseux d’à ch’teure » : Jean-Pierre Calais, Pierre Duquet, Pierre Deglicourt… Les veillées se succédèrent chez « Chés Cabotans », avec un public bon enfant.
Sa mémoire défaillante l’incita à rassembler des mots et des expressions dans un petit recueil. Marie-Madeleine, encouragée et aidée par ses amis Diseux, fait impri- mer un recueil en 1994 « Ch’l’Amassoér », édité à compte d’auteur en deux volumes, il est vite épuisé. Réédité en un volume relié par la librairie du Labyrinthe en 2004, l’Amassoér, revu, augmenté et illustré devient un dictionnaire de référence du picard de l’amiénois. Il sera réédité une nouvelle fois en 2016 quelques mois avant son décès.
Après l’Amassoér, elle fait chanter les enfants en picard avec «Min tchot Leu», un recueil de comptines et de chansons en bilingue français-picard, illustré et accompagné de leurs partitions originales. Chantées a capella par Marie-Madeleine Duquef, les chansons furent enregistrées et nous pouvons les écouter sur une page dédiée du site de la librairie du Labyrinthe.
Toujours à défendre son cher quartier Saint-Leu et ses habitants souvent victimes de mauvaises réputations, Tchotchotte n’a pas vu l’obscène émission de M6 qui pour de l’argent, tire les gens vers le bas, alors qu’elle leur donnait de la hauteur et les rendait fiers de leur quartier certes pauvre, mais aussi historique et solidaire.
Sa chère maison, qu’elle ne quitta qu’après un accident qui la conduite dans un établissement spécialisé à Corbie, se trouve 23 rue de la Tcheue d’vaque, aujourd’hui Quai Bélu.
